1914 Le Creusot -1942 Bamberg
Voici l’histoire de celui qui a déclenché mon intérêt pour le sujet des prisonniers de guerre.
Histoire d’un homme ordinaire en temps de guerre.
L’histoire commence alors que j’étais en deuxième année de licence à l’Université de Bamberg en Franconie
J’y ai rencontré un doctorant qui travaille sur le « Lazarett Sankt Getreu » de Bamberg. Lazarett désigne l’hôpital de campagne où l’on soignait les prisonniers de guerre pour des affections bénignes. Lors de ses recherches il avait découvert l’acte de décès d’un prisonnier de guerre français « Auf der Flucht erschossen », abattu lors d’une évasion. il avait un nom : Bernard Delachaux, et un lieu et une date de naissance. 1914 au Creusot (71). Il m’a alors demandé si je pouvais faire des recherches sur cette personne.
Voici ce qu’on pouvait lire dans l’acte de décès :
Bernard Delachaux – „Gewehrkugeleinwirkung: Erschießung auf der Flucht – Innere Verblutung, Brusthöhle Bauchhöhle – Verstorben in der Roppeltsgasse“ 23.3.1942 – 4 :30Bernard Delachaux – tué par balles , abattu lors d’une évasion – hémorragie interne, région thoracique, et abdominalee – décédé dans l’impasse Roppelts le 23 mars 1942 à 4h30 du matin.
Dès lors, je demandais à la mairie du Creusot, en Haute-Saône, de me faire parvenir l’acte de naissance du PG espérant y trouver des indications sur un éventuel mariage ou des descendants. Je demandais également si il figurait sur le monument aux morts de la commune. Étant également très actif sur un site de généalogie très réputé en France, je cherchais le nom Delachaux sur le site en espérant trouver des généalogistes qui s’étaient intéressés à l’histoire de cette famille.
Je reçu assez rapidement l’acte de naissance de la part de la ville du Creusot qui mentionnait non seulement l’identité des deux parents, mais également son mariage à Thiers dans le Puy de Dôme. Et c’est bien à Thiers que son nom figure sur le monument aux morts. Mes recherches allaient donc se diriger vers ce département qui porte le numéro 63. Entre temps, grâce au site de généalogie, j’étais entré en contact avec une nièce qui habite la région parisienne et qui me disait que sa tante, qui vivait encore, avait connu Bernard Delachaux. Je m’approchai de mon homme, mais je n’imaginais pas encore ce que j’allais découvrir…
Après quelques jours d’attente, j’appris qu’à quelques kilomètres de chez moi, vivait le fils unique de Bernard Delachaux, Albert. Très rapidement, je me suis mis en contact avec lui et il fut très heureux d’apprendre que j’allais travailler sur le passé de son père. Il disait ne pas savoir grand chose de la captivité, ni de la mort de son père, mais qu’il avait de nombreux documents qu’il était prêt à me mettre à disposition dans le cadre de mon étude.
C’est ainsi que je vis, pour la première fois de ma vie, le journal d’un combattant de juin 1940 et un journal de captivité.
Avec mon ami Andreas Ullmann de l’Université de Bamberg, nous avons décidé de transcrire, traduire en allemand et publié une étude sur ce document.
Albert Delachaux me remis également la correspondance de son père, mais aussi des photos.
C’est à Caen que j’ai découvert les documents officiels concernant le décès de Bernard Delachaux. Dont une photo que voici
Grâce à l’association Willy Aaron de Bamberg, nous avons fait venir Albert et sa famille à Bamberg pour la pose d’une « Stolperstein », pierre à trébucher, en l’honneur du prisonnier de guerre Bernard Delachaux. C’est la première fois en Allemagne qu’une telle pierre fut posée pour une victime du national-socialisme, non juive.
Je continuerai mes recherches en Allemagne sur le sujet, lors de mon travail de doctorant. Je compte bien retrouver les actes de jugement des tribunaux concernant le décès de ce Prisonnier de Guerre, peut-être retrouver des documents de la mission Scapini et m’employer à mieux comprendre comment fonctionnait la justice lorsqu’il y avait de tels faits divers.
L’histoire de cet homme a déclenché ma passion pour ce sujet, l’histoire de cet homme m’a permis de rencontrer des personnes exceptionnelles, l’histoire de cet homme me permettra de faire encore de nombreuses découvertes qui me mèneront, je l’espère, vers la compréhension des conditions de captivité de ces prisonniers de guerre passés par le camp de Bamberg.
A suivre …
Ces articles sont bien écrits et permettent de renouer avec « l’histoire ».
Votre blog me permet de faire un petit voyage dans le temps, merci pour le partage. En tout cas, cela fait toujours plaisir de faire la connaissance de ces personnes, qui sait si l’une d’entre elles pourrait être de notre famille.
J’ai connu Albert Delachaux en Alsace, et le grand-père d’Albert, Jean Déglon en Auvergne. De nationalité suisse Jean-Déglon en mission humanitaire alla visiter des prisonniers de guerre en Allemagne, dont son gendre Bernard Delachaux.
Bonjour et merci pour votre commentaire.
Ma mère était une amie d’enfance de l’épouse de Bernard Delachaux, fille de Jean Déglon.
Son arrière petite fille est dans ma classe.
Elle était pour la pose du pavé de son arrière-grand-père présente à Bamberg, je pense. Bien cordialement