
Le destin de Charles Klein nĂ© le 12 septembre 1894 Ă l’heure de midi Ă Stotzheim, fils de Samuel Klein chiffonnier et de Louise nĂ©e Kahn.
Ă proximitĂ© de Barr, la communautĂ© israĂ©lite de Stotzheim a comptĂ© depuis la rĂ©volution et jusquâen 1939 entre trois et six familles. Les Klein, dont une partie avait quittĂ© lâAlsace pour Paris en 1870-71, vivaient encore Ă Stotzheim au dĂ©but du 20e siĂšcle.
Le 20 janvier 1890 à Stotzheim, Samuel Klein alors commerçant israélite, né le 19 novembre 1859 à Stotzheim et fils de Bernhard Josef Klein et de Marie Bloch, épouse Louise Kahn née à Dambach le 8 novembre 1856 et domiciliée à Muttersholtz, fille de Marx Kahn et de Gertrude Michel de Dambach.
Ils ont 4 enfants :
Moritz (Maurice) nĂ© le 5 fĂ©vrier 1893 Ă Stotzheim – dĂ©cĂ©dĂ© Ă Erstein le 2 mai 1976
Karl (Charles) (son acte de naissance comporte une erreur, la maman est nommée Bloch au lieu de Kahn)
Regina (Reine) nĂ©e le 15 octobre 1897 Ă Stotzheim – dĂ©cĂ©dĂ©e Ă Paris 20Ăšme le 23 mars 1958
Horstense nĂ©e le 3 novembre 1899 Ă Stotzheim – dĂ©cĂ©dĂ©e Ă Paris 13Ăšme le 10 novembre 1983

Charles Klein, soldat allemand de la Grande Guerre. (1914-1917)
DÚs le 22 décembre 1914 il est mobilisé au 2. Rekr(uten). Dep(ots) Ers(atz) Bat(ail)lon Garde-Gren(adier) Reg(imen)t 4.

02.08.1914: Das Regiment wurde gemÀà Mobilmachungsplan mobilisiert. Neben dem ins Feld rĂŒckende Regiment stellte es ein Ersatz-Bataillon zu 4 Kompanien, sowie zwei Rekruten-Depots auf. Königin Augusta Garde-Grenadier-Regiment Nr. 4 ( 2 aoĂ»t 1914 : le 4e rĂ©giment de garde-grenadiers Reine Augusta est mobilisĂ© selon les plans de mobilisation. Ă cĂŽtĂ© du rĂ©giment de combat est créée un bataillon de rĂ©serve composĂ© de quatre compagnies ainsi que deux dĂ©pĂŽts de recrues. )
AprÚs 18 jours de formation, il rejoint le bataillon de réserve du régiment.

Drapeau du 4e régiment de garde-grenadiers Reine Augusta (c) Wikimedia
Le 5 mars 1915, nouveau changement de rĂ©giment pour Charles qui intĂšgre un rĂ©giment d’infanterie, toujours dans un bataillon de rĂ©serve, Ă la 8e compagnie du 158e . Son nom alors est le 7. Lothringisches Infanterie-Regiment Nr. 158 ( 7e rĂ©giment dâinfanterie de Lorraine Nr.158. ) Le 1er juin 1915, il est promu caporal.

La vie est le bien le plus prĂ©cieux ( 12e compagnie) – Officier Ă cheval du 158e R.I.
Le 26 juin 1915 départ pour la 1re compagnie du 2e bataillon de réserve du
151e rĂ©giment d’infanterie ( 2. ErmlĂ€ndisches Infanterie-Regiment Nr. 151 )
Le 6 juillet 1915, deux semaines aprĂšs son arrivĂ©e au 151e R.I. affectation Ă la 11e compagnie du 18e rĂ©giment d’infanterie ( Infanterie-Regiment von Grolman (1. Posensches) Nr.18. )

Avec le 18e rĂ©giment, Charles entre dans la guerre et combat en Lituanie. Il rejoint Siauliau (Schaulen) en Lituanie, Ă 200 kilomĂštres au sud de Riga, premiers combats en juin Ă Mitau oĂč lâarmĂ©e allemande assiĂšge les troupes russes dans la ville.

En juillet, Charles et son rĂ©giment combattent autour de la ville de Jakobstadt-Jekabpils. Le but de lâarmĂ©e impĂ©riale est dâatteindre Riga.

Le 2 mars 1916, Charles est blessĂ©, il souffre de fractures osseuses de la cheville, il est Ă©vacuĂ© au Lazarett, hĂŽpital de campagne oĂč il est soignĂ© jusquâau 29 avril 1916 avant de rejoindre son rĂ©giment.
Du 26 octobre au 2 novembre 1916, le régiment est transporté en Roumanie. Le 7 décembre 1916, les troupes allemandes prennent la capitale, Bucarest, Charles entre victorieux dans la ville

Jusquâau 11 aoĂ»t 1917, Charles se bat dans la rĂ©gion des sept citadelles en Roumanie (Sibenburgischen Karpathen)

Le 8 juillet 1917, Charles Klein est décoré de la Croix de Fer (Eiserne Kreuz) de deuxiÚme classe.

Charles Klein, dĂ©serteur de lâarmĂ©e impĂ©riale (1917)
Le 11 août 1917, Charles est fait prisonnier à Darmanesti aprÚs avoir déserté les lignes allemandes. Cet acte courageux a souvent été fatal, les Russes ne faisant pas cas des soldats allemands et trÚs souvent, les abattaient. Les Alsaciens-Lorrains, sachant que les Russes avaient été informés de leur statut particulier par les Français qui leur demandait de les séparer des autres, avançaient vers les lignes ennemies en criant « Franzouski ».


La guerre est finie pour Charles et il est internĂ© dans un camp de prisonnier en Roumanie jusquâau dĂ©but dĂ©cembre 1917.

Charles Klein, prisonnier de guerre alsacien-lorrain (1917-1918)
Il est envoyĂ© dans un dĂ©pĂŽt de prisonniers de guerre alsaciens-lorrains en France oĂč il arrive le 10 dĂ©cembre 1917.

Charles Klein, un Alsacien Ă Paris (1918-1940)
AprĂšs la guerre, il sâinstalle Ă Paris oĂč il Ă©pouse le 14 septembre 1921 Lucienne LĂ©vy, Ă l’Ăąge de 27 ans.

En mai 1931, il entre au service de la société anonyme des chaussures « SuccÚs » à Paris dans le 11e arrondissement.

En septembre 1939, lâEurope est aux portes dâun nouveau conflit, le nazisme sâĂ©tend sur la Pologne entraĂźnant la France dans une nouvelle guerre. Ancien combattant, Charles Klein ĂągĂ© de 45 ans nâest pas mobilisĂ© Ă la dĂ©claration de guerre.
Charles Klein, soldat de lâarmĂ©e Française (1940)
Le 23 mars 1940, Charles Klein est finalement mobilisĂ© comme rĂ©serviste et affectĂ© au dĂ©pĂŽt 204 des travailleurs militaires Ă Saint-Nicolas du Port en Meurthe-et-Moselle. Le 26 juin 1940, il rĂ©ussit Ă faire parvenir une carte postale Ă sa famille pour lâinformer de sa captivitĂ©.
Je suis prisonnier, je me trouve en Lorraine. La santé est bonne. Espérons nous revoir bientÎt.
Charles Klein, prisonnier de guerre (juin 1940-juin 1941)
InternĂ© au camp de Hellocourt. L’usine de chaussures Bata servit de camp de transit de prisonniers pour plusieurs milliers de soldats français et alliĂ©s qui campĂšrent entre les machines parmi les dĂ©bris de verre, toutes les vitres ayant volĂ© en Ă©clats, les stocks et les matiĂšres premiĂšres. Au bout d’un mois Ă six semaines, ils furent transfĂ©rĂ©s en Allemagne.

Pour Charles, le 23 juillet 1940 correspond Ă son arrivĂ©e en Allemagne au camp de prisonniers de guerre Stalag XIIA de Limburg-an-der-Lahn oĂč il reçoit le matricule de prisonnier 15357.

Son statut dâAlsacien-Lorrain le conduit dĂšs septembre vers le Stalag VB de Villingen, prĂšs de frontiĂšres de lâAlsace en vue de libĂ©ration. Charles Klein est identifiĂ© comme juif et nâest donc pas rapatriĂ© dans le cadre des rapatriements dâAlsaciens-Lorrains en vue de son incorporation de force. Il est incorporĂ© dans un commando de travail forestier et travaille Ă lâextĂ©rieur. Le 7 janvier 1941, il change de commando et travaille dans de meilleures conditions. Le 24 mars 1941 il Ă©crit : Mon travail nâest pas dur. Ce jour anniversaire de ma nouvelle carriĂšre militaire. EspĂ©rons que le plus long est fait. Il travaille dans une usine de chaussures Ă la prĂ©paration des commandes Ă Tuttlingen en ForĂȘt-Noire, donc prĂšs de son mĂ©tier. Le samedi aprĂšs-midi et le dimanche ne sont pas travaillĂ©s et les prisonniers peuvent se promener dans les bois.

Le 19 mai 1941 Charles est toujours Ă la fabrique de chaussures : Je nâai pas besoin de fortifiant, vu que je mange plus quâavant et je ne fatigue pas. Avec ce que vous mâavez envoyĂ©, jâai plus que largement Ă manger. OĂč je travaille le personnel est trĂšs gentil.
Le 24 mai 1941, la situation change pour Charles. Il est rassemblĂ© avec tous les Juifs du secteur dans un commando spĂ©cial, le 31 mai il Ă©crit : Je ne suis plus dans mon commando, je suis au camp avec beaucoup de copains entre autres Bottigheimer Robert de Sarrebourg qui est avec moi depuis le dĂ©but et jâen attend de voir dâautres comme Wahl de Guebwiller, le neveu dâAchille de Zellwiller avec lequel jâai Ă©tĂ© une partie de lâhiver.
Dans ce mĂȘme courrier, Charles Ă©voque la libĂ©ration des anciens combattants : Comme vous devez le savoir les anciens de 14-18 seront libĂ©rĂ©s, mais non les israĂ©lites et Alsaciens-Lorrains qui Ă©taient soldats allemands. MalgrĂ© mes 47 ans, je rĂ©siste au choc. Cela fait 8 jours que je suis ici et on nây est pas si mal.
Plusieurs camarades de Charles Klein relatent le camp disciplinaire d’Heuberg oĂč Ă©taient rĂ©unis les prisonniers israĂ©lites ainsi que les Ă©vadĂ©s et rĂ©fractaires au travail.
Contre toute attente, Charles Klein est libĂ©rĂ© le 15 juin 1941 en tant qu’ancien combattant.


Dans le courant de l’annĂ©e 1942, Charles Klein a souffert Ă plusieurs reprises de crises trĂšs douloureuses d’angine de poitrine. En janvier 1951, de nouvelles crises plus violentes que les prĂ©cĂ©dentes se sont manifestĂ©es, qui devaient causer le dĂ©cĂšs de Charles Klein le 30 avril 1951 par un infarctus du myocarde.
Sa veuve, Lucienne Klein, n’a jamais pu faire reconnaĂźtre le dĂ©cĂšs de son mari des suites de sa captivitĂ©.

(c) Archives Familiales Simone Klein
Je veux remercier ici Madame Simone Klein et sa fille Françoise pour la confiance qu’elles m’ont accordĂ© en me laissant entrer dans l’intimitĂ© de leur famille et dans l’histoire de leurs proches. J’espĂšre que mon travail sur le destin de Charles leur apportera autant de bonheur que j’ai eu Ă le rĂ©aliser. Sortir les individus et les destins individuels de l’ombre permettra aux gĂ©nĂ©rations futures de toucher du doigt l’histoire de nos pĂšres, de notre nation et de notre humanitĂ©.
Christophe Woehrle (c) 2019, tous droits réservés.